Sermon du 18ème Dimanche du temps ordinaire prêché par le Rév. Père François Kwik .
Gardez-vous bien de toute âpreté au gain ; car la vie d’un homme, fût-il dans l’abondance, ne dépend pas de ses richesses. Luc 12, 16
Il y avait un gourou qui vivait dans une petite hutte au bord d’une rivière. Tous les matins, après ses ablutions, il suspendait son pagne sur la corde à sécher. C’était son unique bien. Un jour, à sa grand consternation, il découvrit que les rats l’avaient tout déchiqueté. Il dut donc en mendier un autre des villageois. Quand les rats eurent percé des trous dans celui-ci également, il se procura un chat. Fini les difficultés avec les rats, mais en plus de sa propre nourriture, il lui fallait aussi mendier du lait.
« Trop compliquée cette mendicité, pensa-t-il, et trop onéreuse pour les villageois : je vais garder une vache. » Une fois la vache acquise, il lui fallut mendier du fourrage. « Il serait plus simple de cultiver autour de ma hutte, » pensa-t-il. Mais cela aussi se révéla compliqué, car il ne restait plus grand temps pour la méditation. Alors, il engagea des cultivateurs pour s’occuper de la terre à sa place. Or, superviser les cultivateurs devint tout un boulot : il épousa donc une femme qui partageait sa besogne. Bientôt, évidemment, il fut l’un des hommes les plus riches du village. Et aux visiteurs qui venaient le voir, il disait : « Vous ne me croirez pas, mais c’est la seule manière de conserver mon pagne ! »
Sœurs et Frères dans le Christ, je me sens comme le gourou dans l’histoire que je viens de raconter. Il y a dix ans j’ai dû fuir la Rép Dém. du Congo où à cause de la guerre civile. J’ai dû laisser mes paroissiens ainsi que toutes mes possessions. Et je ne suis arrivé aux Pays Bas qu’avec un sac à main. C’était il y dix ans. Et regardez ma chambre à Oosterbeek où j’habite dans la maison de missionnaires retraités, une grande chambre pleine de confort : de grands fauteuils, une T.V. , des armoires pleines de DVD, de CD et de livres, un frigo ; des choses dont je n’ai pu rêver il y a dix ans. Ce sont des choses que j’ai acquises au fil des années, petit à petit, lentement mais sûrement. Et derrière cette réalité des biens accumulés, se trouve la lutte que je dois lutter,
l’enjeu d’être ou de paraître : l’homme qui je suis ou l’homme qui paraît être qui je suis.
Derrière cette réalité des biens accumulés, se trouve
l’enjeu d’être ou d’avoir : suis-je qui je suis : une personne, une personnalité ou suis-je ce que j’ai, ce que je possède, le titre que je porte, le travail que je fais, les enfants que j’ai mis au monde, pas plus.
Derrière cette réalité des biens accumulés, se trouve
l’enjeu de l’esclavage ou de la liberté spirituelle.
En d’autres termes je dois me poser la question : « à qui, à quoi servent les biens dont j’ai la garde ? Est-ce à mon seul profit, à mon seul confort, à ma seule intelligence ? Ou est-ce en vue d’une vie meilleure pour des autres, pour tous ?
Et voilà il y a des jours où je ne mets pas la TV, où je ne lis pas de livres, où je n’écoute pas de musique, mais où je fais des promenades, où je rends visites aux malades à l’hôpital ou chez eux, des visites aux collègues isolés.
Au 13ème siècle , un homme nommé François d’Assise avait bien conscience du risque de l’avoir, il en avait perçu les limites et les dérives. On lui doit cette parole de sagesse : « Si j’avais des biens, il faudrait des armes pour les défendre. »
En effet, seul l’usage des biens, sans l’esprit d’appropriation, peut être facteur de fraternité. C’est bien à cela que nous sommes appelés, conscients que Dieu est le plus désirable pour chacun.
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